PSYCHOTRAUMATOLOGIE
 
PSYCHOTHERAPIE    PSYCHOSOMATIQUE        PSYCHANALYSE

                                                                                            

l'Archaique et le pré-verbal

 

« Les mots sont des vibrations sonores, les images des vibrations lumineuses, les sensations des vibrations de la chair, et en physique, une vibration est un espace ayant une existence réelle. Lorsque je prononce un son, un mot, je crée un espace vibratoire continu de ma bouche à votre oreille. Ce qui signifie que si nous ne vivions que dans des espaces vibratoires, si nous n’avions pas de corps, pas de matérialité, pas de toucher et pas d’yeux pour nous rendre compte, nous ne pourrions jamais nous vivre comme séparés les uns des autres ».

Citation de Françoise DOLTO « C’est la parole qui fait vivre »

 

Comment écouter le non verbal ?

 

L’archaïque est la période hors langage verbal.

La ligne de démarcation serait donc tracée au moment où apparaissent chez l’enfant des possibilités de traductions langagières des messages provenant des adultes (…) d’où la grande difficulté à faire « parler » l’archaïque[2].

 

Les expériences archaïques sont hors temps et traversent le temps ; (…) Nous sommes faits de nos expériences archaïques dont la symbolisation n’en efface pas les traces car elles sont inscrites dans la mémoire du fœtus et la mémoire corporelle.[3]

Didier Anzieu dira qu’Au départ, c’est senti, c’est éprouvé, c’est dans le corps »

Au départ, c’est senti, c’est éprouvé, c’est dans le corps. A l’origine, c’est presque kinesthésique et cénesthésique, c’est comme si la totalité du corps était impliqué[4].

A l’origine, tout est kinesthésique (c’est-à-dire proprioceptif avec la perception des déplacements des différentes parties du corps) et cénesthésique (c’est-à-dire une sensibilité interne) comme si c’était la totalité du corps qui était impliqué[5].

Spitz[6] indique que dans les 6 mois de la vie et parfois plus tard, le système perceptif, le sensorium du nourrisson se trouve en état de transition entre une organisation cénesthésique (émotionnelle non verbale) et diacritique (processus de pensée consciente) dont la relation rappelle celle du lien existant entre les processus primaires et secondaires. Les signes et les signaux qui atteignent le nourrisson et qui sont reçues par lui appartiennent aux catégories suivantes : équilibre, température, vibration, contact cutané et corporel, sonorité, rythme, tempo, durée, son, résonnance, sonorité etc.

Spitz indique que certains adultes ont conservé cette organisation diacritique (musiciens, danseurs, acrobates, poètes, peintres, aviateurs) lesquels son à la fois sensibles et nerveux.

« Mais une chose est certaine, ils s’écartent de l’homme occidental qui a choisi de mettre l’accent sur une communication diacritique. Les médiums, hypnotiseurs etc. sont tous logés à la même enseigne, ils dérangent et menacent notre univers rationnel. Nous condamnons même l’intuition. Ces sensibilités, l’homme occidental les refoule »

Spitz note que dans la société, les adjuvants sont utilisés pour favoriser la régression à savoir le jeune, la solitude, l’obscurité, l’abstinence mais aussi les drogues, l’alcool, le bruit, le rythme et les techniques respiratoires.

 


[1] R.Roussillon, L’Origine et l’Archaïque, L’incontournable dimension archaïque de la vie psychique dans l’écoute psychanalytique, PUF, 2017

[2] L’archaique, V.Marinov, EDK, 2008, p.10

[3] R.Roussillon, L’Origine et l’Archaïque, L’incontournable dimension archaïque de la vie psychique dans l’écoute psychanalytique, PUF, 2017, p.112

[4] D. Anzieu, Le corps de l’œuvre, Paris, Gallimard, 1981, in A.Brun, Archaïque, sensorialité et processus créateur, p.165 in L’originaire et l’archaïque, PUF, 2017

[5] R.Roussillon, L’Origine et l’Archaïque, L’incontournable dimension archaïque de la vie psychique dans l’écoute psychanalytique, PUF, 2017

[6] R.Spitz, De la naissance à la parole, Bibliothèque de Psychanalyse, 2002

 

 

Les cris du bébé sont en deçà du phonème

c’est-à-dire hors du champ lexical, composé de sensoriel

 

Au travers de la langue maternelle, c’est la trace de l’archaïque en nous dont il s’agit, toute l’aventure de l’être humain.

Au départ c'est un protolangage fait de cris, en deçà du phonème, pour manifester la faim.

Ce non verbal est composé d'éprouvés. 

Pendant la période pré verbale, les échanges vocaux ne sont pas absents, bien au contraire. Les mères parlent à leurs enfants, souvent dans un monologue continu et l’enfant répond en gazouillant. Ce premier échange est tel une chorale.

Ce sera bien plus tard après la naissance que l’enfant pourra mettre des mots sur ses émotions.

Nicolas Abraham et Maria Torok[10]pensent que le vide de la bouche, dans un premier temps, n’est que cris et pleurs ; cependant, grâce à la présence maternelle, ce vide devient, dans un désir d’appel, moyen de faire apparaître le langage, le passage de la bouche pleine de sein à la bouche vide de mots s’effectue au travers d’expériences de bouche vide.

Apprendre à remplir de mots le vide de la bouche, voilà un premier paradigme de l’introjection. (…), le désir d'entrer dans le langage.

 

La chorale du premier échange, le stade pré-verbal

La langue maternelle est le contenant de la relation existentielle comme étant le schème[2] de tous autres les schèmes. 

 

Ce non verbal est une proto communication

c’est-à-dire un moyen de liaison entre l’enfant et le monde (sa mère)

 

Au stade préverbal, la communication entre mère et enfant serait basée sur une perception extrasensorielle ou sur la télépathie.[4] Cet encodage en éléments α sont intrinsèques à la langue maternelle c’est-à-dire à l’outil de communication primaire entre la mère et le bébé. Dit autrement, les émotions seront contenues dans la langue maternelle par le principe de l’identification projective dont le bébé va se servir pour introjecter les mots de la mère sur ses propres éprouvés β.  On comprend donc que les mots dit dans une autre langue n’auront pas la même résonnance émotionnelle.

Ce qui est pensé (et plus tard parlé), c’est l’expérience émotionnelle.

 

[1] P.Boquel, la psychosomatique relationnelle, Esprit et corps, 2012, p.39 et 40 [2] Un schème est une structure, une organisation inconsciente [3] D. Winnicott, L’enfant et sa famille, Poche, 2017 [4] R. Spitz, De la naissance à la parole, p. 96, PUF, 1968 [5] P.Delion, l’observation du bébé selon Esther Bick, son intérêt dans la pédopsychiatrie d’aujourd’hui, Eres, 2004, p.177 [6] La pensée, Approche psychanalytique, Le rôle de l’objet dans la constitution de la pensée chez Bion, C.Athanassiou-Popesco, PUF, 2015, p. 63 et 64 [7] La pensée, Approche psychanalytique, M. EMMANUELLI et F. NAYROU, PUF, 2015, p. 7 [8] W.R.Bion, L’arrogance, Réflexions faite, PUF, 1983 [9] W.R.Bion, Attaque contre les liens, Réflexions faite, PUF, 1983, p.105-123 [10] N.Abraham et M.Torok, Deuil et Mélancolie, in L’Ecorce et le Noyau, Paris, Aubier-Flammarion, 1978, in G.Harrus-Révidi, Psychanalyse des sens, p. 48, Petite Bibliothèque Payot, 2006 [11] S.Freud, La naissance de la psychanalyse, p.336, Paris, PUF, 1956 [12] D.W. Winnicott, « La préoccupation maternelle primaire, in De la pédiatrie à la psychanalyse, 1956, Paris, PUF, 1968 [13] R.Spitz, De la naissance à la parole, Paris, PUF, 1968 in G.Harrus-Révidi, Psychanalyse des sens, p. 48, Petite Bibliothèque Payot, 2006 [14] G.Harrus-Révidi, Psychanalyse des sens, p. 50, Petite Bibliothèque Payot, 2006

 

La musicalité, équivalence symbolique

 

La musicalité est intrinsèque au langage maternel.

La musique et le langage ont comme base commune de réduire les tensions[1].

Dans cette parole, les phonèmes sont les premiers éléments de sens pour l’enfant qui les reçoit des autres avec les affects associés. « Je peux réintégrer dans le mouvement rythmique des phrases que j’avais perçu le son, isolant encore dans mon écoute, au ras du pulsionnel, les mouvements primitifs d’amour, de violence et de haine ».[2]

La langue dépasse le message avec les sons qui ne sont que des mailles de la chaîne parlée, ce que Fonacy appelle la « vive-voix »[3]Chaque son du langage est un ensemble de traits distinctifs articulatoires et acoustiques et se prête à la représentation de plusieurs pulsions à la fois[4].

La mélodicité sert d’indice émotionnel. Pour Fonacy, la mélodie est l’expression de mouvements corporels imaginaires correspondant à des situations émotionnelles, avec des corrélations constantes entre les sons et la pulsion.

 

Le bain sonore, l'expérience musicale de l'enveloppe sensorielle

"La notion de bain sonore introduit quelque chose qui n'est pas propre au sonore, mais plutôt à la cénesthésie, l'apesanteur, que j'associe pour ma part à la musique.(...). On se sent porté, transporté, bercé ou dansant, dans un mouvement sans prise sur le réel, "gratuit", pour le plaisir, que je rapproche des gesticulations du nourrison porté, des qualités du holding (Winnicott, 1971). (...). A ce stade, "l'enveloppe sonore" de la mère, c'est à dire sa faculté de mentaliser son vécu sonore (sous les formes verbale et musicale), constitue pour le nourrisson un premier pare-excitation".

 (E.Lecourt in D. Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p. 224 à 226) 

 

"C'est l'intégration combinée du son et du silence, réalisée par les codes verbal et musical,

constitue une protection généralement efficace contre leurs dimensions traumatiques (intrusion, trou, rupture, pour le son, trou, rupture, béance, pour le silence) et persécutive"

(E.Lecourt in D. Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p. 236)

 

 


[1] R. Kaes, La parole et le lien, Associativité et travail psychique dans les groupes, p. 212, Dunod, Paris, 2010

[2] R. Kaes, La parole et le lien, Associativité et travail psychique dans les groupes, p. 210, Dunod, Paris, 2010

[3] I.Fonacy, La vive-voix, Payot, 1991 in R. Kaes, La parole et le lien, Associativité et travail psychique dans les groupes, p. 213, Dunod, Paris, 2010

[4] I.Fonacy, La vive-voix, Payot, 1991 in R. Kaes, La parole et le lien, Associativité et travail psychique dans les groupes, p. 213, Dunod, Paris, 2010

[5] D. Anzieu, les contenants de pensée, p.14, Dunod, 1993

[6] D. Anzieu, les contenants de pensée, p.13, Dunod, 1993

7 (E.Lecourt in D. Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p. 236)

 

 

Qu'est ce que l'émotion?

 

Le corps dit l’émotion.

L'émotion est liée la relation, réceptacle premier des émotions dans les premiers temps de vie.

 

Les émotions sont exprimées par le corps et permettent à l’organisme de s’adapter au contexte, sans contrôle décisionnel (même si secondairement il est possible d’en contrôler l’intensité et l’expression comme nous le verrons plus loin).

Les émotions sont psychologiques, composées de l’affect et d’un souvenir lié à une cognition et en ce sens une carte de monde propre selon les individus, les époques et les cultures.

 

4 grandes familles d'émotions et leurs arrières-plans

la colère, la joie, la peur et la tristesse.

 

L’affect est le premier langage utilisé par le petit d’homme c’est-à-dire par la sensation intra corporelle

Les états de stupeur, de rage, de terreur tout comme les mimiques, les postures, les gestes sont des états primitifs qui expriment ce que les mots ne peuvent pas dire. Chez les enfants qui ne peuvent pas encore dire non, les situations de déplaisir sont évacuées par le vomi, le fait de jeter ou de caser des objets, par le corps qui se cambre etc. Les sensations corporelles se manifestent aussi par les affections psychosomatiques.

 

 

Bion et l’expérience émotionnelle

 

Bion influence la pensée psychanalytique contemporaine.

Avec lui, ce n’est plus seulement la symbolique mais c’est le processus de pensée dont il est question.

Selon Bion, pour être en mesure de supporter les expériences qui l’insécurisent et l’angoissent le bébé ou le jeune enfant a besoin d’une expérience fondamentale : celle que les sensations et les émotions qui le débordent et le mettent dans un état de détresse soient prises en compte par une personnalité plus mûre, celle d’un adulte capable de tolérer les sentiments que suscite un bébé en détresse, car lui n’est pour l’instant pas équipé – psychiquement et émotionnellement – pour y faire face. 

C’est ce que Bion appelle la relation contenant- contenu, le psychisme de la mère étant le contenant, le réceptacle pour les émotions du bébé.

 

W.R. Bion, aux sources de l'expérience, PUF, 2003

W.R. Bion, Transformations – passage de l'apprentissage à la croissance, PUF, 1982

W.R.Bion, Développement de la pensée schizophrénique, Réflexion faite, PUF, 1983

W.R.Bion Différenciation des personnalités psychotiques et non psychotiques, Réflexion faite, 1983

W.R.Bion, L'arrogance, Réflexions faite, PUF, 1983

W.R.Bion, Attaque contre les liens, Réflexions faite, PUF, 1983, p.105-123

W.R.Bion, Entretiens psychanalytiques, Gallimard, 1980, p.121

 

les enveloppes psychiques de Didier Anzieu

Le dispositif thérapeutique se propose comme enveloppe corporelles étayante pour le Moi

 

 

"Le modèle de l'enveloppe psychique est développée par Didier Anzieu. "La limite qui est une catégorie organisatrice fondamentale de l'espace ne sera plus analogiquement assimilée à la peau, sa texture et sa fonction d'enveloppe. L'enveloppe psychique devient un concept qui permet de découvrir et d'explorer les phénomènes d'interface (p. 8)."..."Ce qui est premier au niveau de la construction de l'espace et par là même de l'appareil psychique c'est la construction d'une limite"..."L'enveloppe psychique devient ainsi une limite non fermée contrairement à la peau (...). Elle a une fonction supplémentaire , elle permet de filtrer puis de différencier monde interne et monde externe, objet animés et inanimés. (...) Elle apparait aussi à partir de l'utilisation d'objets frontières qui sont le support de projections, et dont les caractéristiques formelles ont également un pouvoir organisateur sur l'appareil psychique (...) Le plus ancien et le plus connu est l'objet transitionnel repris ensuite comme phénomène transitionnel par D.W. Winnicott

 

(Didier Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p.9)

 

 

"L'enveloppe psychique devient ainsi un concept qui permet de découvrir et d'explorer les phénomènes d'interface. (...). Elle devient ainsi le support, le lieu de passage entre les différents phénomènes, elle a une fonction supplémentaire, elle permet de filtrer puis de différencier le monde interne et monde externe, objets animés et inanimés".  (...) Comment ce phénomène est-il possible? (...) Elle se crée d'abord à partir du contact peau à peau (...). Elle apparait aussi à partir de l'utilisation d'objets frontières qui sont le support de projections, et dont les caractéristiques formelles ont également un pouvoir organisateur sur l'appareil psychique. Ils sont utilisés spontanément par les enfants et les adultes en dehors de l'observation des psychologues. Le plus ancien et le plus connu est l'objet transitionnel repris ensuite comme phénomène transitionnel par D.W. Winnicott". (...) On ne peut comprendre qu'un objet puisse être à la fois dedans et dehors sauf s'il est placé à la frontière de deux domaines. A ce moment une face de l'objet est tournée vers le dedans, une autre vers le dehors (en ce sens on peut parler d'une structure en double feuillet de l'enveloppe. C'est la construction de cet objet, puis son utilisation qui va capter et situer le phénomène interface, opérateur de la mise en correspondance des différentes domaines psychiques, mais aussi culturels et naturels.(...). Ces objets "émergent spontanément d'une part de l'expérience médiatisée du corps à corps mais aussi dans des expériences projectives et psychothérapeutiques dans lesquels un matériel graphique ou un objet concret sert de médiateur relationnel " 

 

(Didier Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p.9 à 10)

 

 

Le Moi Peau est un concept défini par Didier Anzieu qui correspond à une expérience de limite corporelle et tactile du corps, perçu comme un "espace fermé par une limite assimilable à une peau psychique différenciant deux espaces topologiquement séparés avec à l'intérieur l'espace psychique dans lequel vivent en ordre ou en désordre des contenus psychiques, des représentations : affects cognitions, pensées. Au dehors, nous trouvons le monde, physique, naturel, mais aussi d'autres individus que le sujet, ainsi que la réalité culturelle. Si l'on s'en tient à l'analogie de la peau pour décrire la limite, l'enveloppe psychique peut-être assimilée à une membrane souple qui dans une première fonction différencie les domaines du dedans et du dehors tout en permettant des échanges entre ces espaces. (...). Elle permet de fonctionner dans un certain ordre rassurant dans lequel la réalité psychique de l'individu est située dedans et celle de l'autre dehors, fonctionnant avec une logique comparable, mais aussi de reconnaître et de différencier le monde naturel du monde humain. Ce modèle est celui avec lequel nous fonctionnons la plupart du temps. Il peut nous représenter un conflit, en offrant la possibilité de maintenir les tensions à l'extérieur du moi, tout en investissant la relation à l'autre et le monde naturel".

(Didier Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p.6)

 

 

"Ces repères permettent de maintenir une cohérence. Suivant les tensions, le sujet peut avoir l'impression de se vider progressivement ou brutalement et de ne plus avoir de représentations. Il lui reste alors à rechercher des sensations qui peuvent se lier à des mises en actes e prenant appui sur des drogues licites ou illicites, qui, par leur effet, donnent la sensation fugace et souvent hédoniste d'une identité cohérente"

Didier Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p.6

 

 


"La qualité d'enveloppe n'est envisageable, à proprement parler, que par étayage sur l'expérience du Moi-Peau.

Je souscris sur ce point aux indications données par D.Anzieu (1985,p.103) : Le Moi-Peau est une surface psychique qui relie entre elles les sensations de diverses natures et qui les fait ressortir comme figure sur ce  fond originaire qu'est l'enveloppe tactile : c'est la fonction d'intersensorialité du Moi-Peau, qui aboutit à la constitution d'un "sens commun" (le sensorium commune de la philosophie médiévale), dont la référence de base se fait toujours au toucher.

A cette carence de cette fonction répondent l'angoisse de morcellement du corps, plus précisément celle de démantèlement (Meltzer, 1975), c'est à dire d'un fonctionnement indépendant, anarchique, des divers organes de sens"

(E.Lecourt in D. Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p. 236)

 

 

"Que se passe t-il lorsque cette limite se rigidifie, ou lorsqu'elle se déchire? Peut-on fonctionner sans limites? Est ce que ces ruptures peuvent avoir des conséquences pathologiques? Du point de vue de la cohérence du sujet, toute atteinte de l'enveloppe risque d'entraver une confusion entre monde psychique et monde naturel (...). Inversement, le monde externe peut déferler et envahir l'espace psychique, affects et cognitions sont indifférenciées : dedans et dehors, objets et contenus psychiques deviennent équivalents. Le monde externe, le paysage, devient l'ultime forme contenant l'appareil psychique en train de se désagréger. (...) Le bruit de vagues, la nuit, est celui de la nuit même; et combien l'ont entendus retentir au fond de leur âme; tel l'espoir qui se brise perpétuellement dans l'obscurité, avec un bruit sourd d'écume résonnant dans les profondeurs"

(Fernando Pesso, Le Livre de l'intranquilité, 1982, tr.fr. Bernardo Soarès, Paris, Christian Bourgois, 1992 in Didier Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p.6 à 7).

 

"Le modèle de l'enveloppe psychique permet ainsi de décrire des états instables et des transformations que l'on trouve dans des moments de crise dans lesquelles le sujet se sent menacé de perdre son identité."

(Didier Anzieu, Les enveloppes psychiques, Dunod, 2000, p.7)

 

Les signifiants formels

 

L’espace psychique est lié corporel.

D. Anzieu indique que l’espace psychique n’existe pas sans le corps. Son concept du Moi-Peau est l’appareil psychique qui s’étaye sur les sensations de la peau et qui consiste en une figuration métaphorique de celle-ci[1]. Le Moi-Peau fit le lien entre la psyché et le corps.

Il s’agit du premier espace de réflexivité : on se perçoit à la fois du dedans et du dehors.

Anzieu va définir des signifiants formels (archaïques) constituées d’images proprioceptives, cinesthésiques et kinesthésiques faisant allusion aux états de la matière ou de l’espace encore indifférenciés dans un espace bidimentionnel, créant des confusions dedans-dehors. Ils évoquent le rétrécissement, la courbure, l’aplatissement, l’ondulation, le chute, le tourbillon, l’arrachage, le dédoublement, l’inversion, le décollement, l’écart etc que l’on peut relier aux mécanismes de défense psychotiques (la pulvérisation, la déchirure, la fragmentation)

« Un corps solide est traversé »

« Un bras s’allonge »

« Un orifice se creuse »

« Une ligne se courbe » 

La peau est le référent de base.

 

Les signifiants formels induisent des états limites lorsqu’ils sont altérés.

Notons que leurs appellations cependant sont assez variées et ne se limitent pas à Anzieu.

 

 


[1] D.Anzieu, Le Moi Peau, Dunot, 2020, p. 81 VOIR ANNEXE 6 Les huit dimensions métaphoriques du Moi-Peau

 

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